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Les Dames Blanches.

 

Souvent grande et élancée, fuselée, belle et gracieuse, mince et légère, les épaule blanche comme de la neige des montagne et les yeux bleu comme la source des roches. Quel que soit l'habit, le tissu est toujours d'une blancheur éblouissante, même les robes à brocart, richement brodées de bijoux, sont estompées par la blancheur qui les enveloppe.
Les Dames Blanches éparpillent leurs apparition par toute la France. Les Grandes Pucelles se baignent dans la Moselle, les Vierges Sœur de Parameix se rendent mutuellement visite en suivant toujours le même chemin aérien à travers les frondaisons de la forêt. Elle se montrent surtout à proximité des fontaines, des sources, des étangs, des grottes, de très vieux arbres, de dolmens, d'ancien lieux de culte, auprès des calvaires, des cimetières errant parmi les vestiges ronceux de châteaux ruinés, au bord de routes où se sont produits des accidents.
Tantôt fée tantôt fantômes, les Dames Blanches errent sur la fine lisière où viennent se faufiler, s'étirer et se confondre les nuées féeriques aux rives floues de l'au-delà, ces Dames Blanches symbolisent la pureté menacée. Elle errent et se lamentent sur les lieux de leur trépas en houant et rejouant sans cesse le drame qui les a précipitées dans la damnation.
Mais leurs activités ne sont pas toujours aussi tragiques. On les voit danser, batifoler, offrir des feuilles qui se transforment en or. Elle nourrissent les promeneurs égarés, les préviennent des dangers, les guident sur le bon chemin.

 

Ce sont des créatures alchimiques de la matière imaginaire et de l'esprit imaginant, elles sont les alliances subtiles des émanations de la forêt, des soupirs et l'eau et des vapeurs humaines. Saluées par le chant des grenouilles, elle remontent le long des autels sacrées où bruissent encore les échos d'anciennes prières. Accrochées aux fuseaux des rayons, elles s'étirent des limbes de pénitence, d'une roche sanglante, d'un songe. A la garde-robe des fées, elles empruntent des voiles de peine ou des souliers dansant et, l'espace d'un minuit, font et refont les gestes d'une histoire secrètes et enfouie dont se souvient la mémoire d'un hibou.

Lorsque la nuit est sombre la Dame Blanche Belle d'Elven se promène sur les landes et dans les plaines aux environ du château, de nombreuses taches de sang souillent sa robe. Souvent on aperçoit aussi un fantôme drapé dans un suaire qui vient à sa rencontre. Tous deux échangent des paroles d'amour et l'on se garde bien de les troubler. Ce sont les âmes de la dame d'Elven et d'un chevalier qui périt en la défendant; quand il fut mort, elle l'embrassa, puis s'enfonça un poignard dans le cœur.

L'ombre blanche de Midone, frappée par son père un jour qu'elle s'interposait entre lui et son époux, revient chaque nuit prier et pleurer sur les vestiges du château de Montaigle. Elle erre en silence en le cherchant désespérément; mais tous les 10 ans, au coup de minuit, elle l'appelle en poussant un seul cri: «Gilles !».

Les habitants de Pouancé voient régulièrement une femme vêtue de blanc qui s'élève comme une vapeur légère, un doigt posé sur les lèvres. Elle soupire et plane au-dessus des remparts ruinés du château. C'est le spectre d'une noble dame séquestrée et emmurée par un mari jaloux dans une des salles souterraines de la forteresse. On y a mis à  jours une chambre secrète où se trouvait la dépouille desséchée d'une femme assise devant une table garnie d'une assiette et d'un couvert d'argent. Dans la bouche grande ouverte du cadavre encore lié à son fauteuil, étincelait une pièce d'or.

 

Certaines de ces pâles créatures gardent des trésors comme des pénitences.

Une femme blanche se penche, la nuit, au-dessus des créneaux du château de Montafilant, près de Corseul, en Haute Bretagne, avant de disparaître dans les souterrains d'où on l'entend compter des pièces d'or et pleurer. Cette ombre diaphane est celle d'une dame de la maison de Dinan que son écuyer vendit pour une forte récompense, et elle revient ainsi réclamer à ce serviteur félon le prix qu'il a reçu pour sa trahison.

Il y a de cela bien longtemps, des nones enfouirent un énorme coffre rempli d'or et d'objets précieux dans une caverne près du village de Haselbourg. Depuis leurs âmes errent la nuit dans la compagne jusqu'au jour où un humain découvrira le trésor et en prendra possession. De temps à autre elles apparaissent à des promeneurs solitaires. Une fois un jeune homme vit dans un verger une dame vêtue de blanc. Elle tenait en main un trousseau de clefs et le lui tendait avec insistance. Mais le garçon s'enfuit, épouvanté, poursuivit par les cris désespérés de la «conjurée». Elle se montra ensuite à une jeune fille qui refusa aussi les clefs. La religieuse fondit en larme et disparut. 

Tous les 100 ans une Dame Blanche se montre au bord de l'étang d'Offémont. Elle tient, serrée entre les dents une clef de feu. Si on acceptait de s'en servir, elle serait délivrée de sa damnation.

Au pays de Galles, dans la vallée d'Ogmore, les luits de pleine lune, on entend des chants lugubres venir des ruines du château voisin. C'est la voix de la Dame Blanche, Y Lady Wen, qui veille un «noir trésor». On s'enferme, on se terre, on éteint de peur qu'elle ne vienne frapper à la porte pour en proposer l'accès. Hélas toujours le passant demeure sourd à ses supplication. Un fois encore il s'enfuit, dédaignant la caresse d'un corps astral sous une robe de lune; refusant l'or des Fées - car toutes leurs actions, lorsqu'elles se montrent aux hommes, n'ont d'autre but que de se libérer de la malédiction qui les condamne à la hantise et les empêche d'accéder au repos.

 

La Demoiselle Blanche de Tonneville règne sur les landes depuis qu'elle s'était écriée:«Si après ma mort j'avais un pied dans le ciel et l'autre en enfer, je retirerais le premier pour avoir toute la lande à moi». Un homme qui traversait son lieu de hantise entendit une voix féminine très douce qui demandait:«Où coucherai-je cette nuit ?». Le cavalier, apercevant une belle demoiselle en blanc, répondit:«Avec moi.» Aussitôt la jeune fille sauta en croupe derrière lui. Mais quand il voulut l'embrasser, elle lui montra des dents q'une longueur démesurée et s'évanouit. Il s'aperçut alors qu'elle l'avait conduit au milieu des marais pour le voir s'y noyer.

Dans la forêt de Serre, et les bois de la Faux, en Jura, les Dames Blanches attirent les garçons par des chants mélodieux et des gestes amoureux, puis se transforment en Goules pour les dévorer.
La Dame Blanche de la cathédrale de Strasbourg conduit vers les hauteurs le visiteur imprudent jusqu'à ce que le vertige le pousse dans le vide.
La Demoiselle Blanche au miroir étourdit et fait tournoyer sa victime dans les airs avant de la laisser retomber sans mémoire.

Les Dames Blanches sont aussi messagères de mort et de catastrophes: il y avait autrefois à Mortaille-sur-Sèvre une fontaine qui inspirait la terreur. Après avoir fait 5 fois le tour du dallage, on voyait apparaître une forme blanche ressemblant à une statue de neige qui soupirait et s'agitait. Les formes se précisaient et l'on pouvait voir une grande femme aux cheveux clairs, vêtue d'une robe blanche. Rempli d'effroi, on voulait s'enfuir. Mais sans cesse l'ombre rattrapait le fuyard et ne retournait à ses fumées qu'après lui avoir prédit peines et deuils qui toujours se réalisaient.

 

La Dame Blanche est une des rares fées qui ne s'est pas fanée, qui s'est toujours adaptée aux modes du temps jusqu'à troubler des ses voiles brumeux les techniques de l'audiovisuel. La petite Blanquette des fontaines fait régulièrement la une des journaux. Un peu partout la même histoire se répète: il fait nuit, il pleut, les phares de la voitures éclairent brusquement au coin d'un carrefour de campagne la forme mince d'une jeune fille vêtue de blanc. Elle fait signe de la main et le conducteur s'arrête, pour la conduire plus loin. Elle paraît si fragile dans sa robe trempée qu'il lui propose son manteau. Après quelques kilomètres, elle lui montre où l'arrêter; et avant même qu'il ne ralentisse et se gare, elle disparaît comme ça, tout à coup sans bruit, sans ouvrir la portière. Il aimerait récupérer son manteau que, dans la hâte, elle a emporté. La porte d'une maison s'ouvre, une dame le fait entrer et se trouble à son récit, sanglote à la description de l'inconnue dont il reconnaît les traits sur la photographie qu'elle lui tend: c'est celle de sa fille, tuée dans un accident il y a 5 ans. Une voiture l'a renversée justement à ce carrefour. Ce n'est pas la première fois qu'elle «revient»; d'autres automobilistes sont déjà venu lui raconter leur étrange aventure. A chaque fois «la blanche passagère» s'évanouit devant son ancienne demeure et regagne le cimetière.
Sur la pierre tombale de la jeune défunte, qu'il est allé visiter sans trop y croire, son manteau est posé... 

 

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