Le Livre des Morts

 

Le Livre des Morts des Égyptiens est un recueil décousu d'invocation et d'incantation magiques composé de textes généralement écrits sur des rouleaux de papyrus, destines à être placés dans les tombeaux. Cette coutumes qui date approximativement du XVIIe siècle avant J.C. était réservée aux familles relativement aisées.

Il s'agissait de permettre ainsi au défunt de triompher des dangers de l'Au-Delà en lui offrant, notament, la possibilité de se changer en l'une des quelconque des puissantes créatures qui peuplaient l'univers des morts et, pour ce faire, en lui apprenant les mots du passé qui lui ouvraient, une à une, les portes de l'Après-Vie, afin qu'y pénétrant avec la protection des dieux, il puisse, cependant s'identifier à certains d'entre eux.

 

 

Imagination et conservatisme

 

Bien que leur foi ait évolué au cour de leur histoire (qui fut exceptionnellement longue) les Égyptiens répugnaient à abandonner dieux ou mythes anciens alors même qu'ils en adoptaient de nouveaux. Ils s'efforçaient de concilier les deux.

A différentes époques les prêtres de chacun des foyers du culte (Héliopolis, Memphis, Thèbes et Hermopolis) tentèrent de mettre en accord leurs croyances respectives pour les fondre en une doctrine unique. Mais il est permis de douter qu'ils aient jamais réussi dans leur entreprise !

Les défunts s'identifie au grand dieu de la mort (Osiris) roi de l'Au-Delà, dont il prend jusqu'au nom sacré d'Osiris-Ani. L'avenir promis aux vivants, au terme de leur existence terrestre, manque pour le moin de clarté. Après s'être rendus aux « champs de la paix  » ils s'élèveraient, croyaient-ils, dans le ciel pour y vivre comme les étoiles, s'unir à Osiris pour partager sa royauté léthale ou encore voyager à bord de la nef solaire de .

Au chapitre 125, dit de la « Protestation d'innocence », la contradiction apparaît plus flagrante. Le postulant jure à 42 dieux de n'avoir jamais fait de mal à personne et énumère toutes les fautes ... qu'il n'a pas commises ! Ou bien les Égyptiens faisaient montre d'un sens aigu de la moralité, ou plus probablement ils conféraient une vertu magique favorable à la litanie qu'ils énonçaient.

 

La Protestation d'Innocence.

 

 

Magie et religion

 

Le culte des dieux constituait une obligation fondamentale qui laissait fort peu de place à la piété personnelle. Les prêtres ne se consacraient pas qu'aux signes extérieurs de la foi, négligeant de surcroît le bien être spirituel du petit peuple, qui d'ailleurs n'était admis en aucuns cas à fréquenter les sanctuaires intérieurs où se trouvaient les autels des dieux. Aux humbles ne restaient guère, en guise de grandes cérémonies, que quelques fêtes, comme celle d'Osiris célébrée au printemps (symbolisant le renouveau) et autres traditions populaires.

Le recours à la magie ne se limitait pas aux pratiques religieuses mais imprégnait touts la vie. On récitait, par exemple, certaines incantations au chevet d'un malade auquel on avait administré des narcotiques. Pour régler une querelle entre propriétaires, on s'en remettait aussi au verdict de certains oracles. De nombreux papyrus contiennent quantité d'invocations censées conjurer le mauvais sort. On en trouvait gravées sur des amulettes placées dans les tombeaux et qui portaient également des signes: nœud d'Isis, œil d'Horus, colonne Djed , propres à attirer sur les trépassés toutes sortes de bénédictions.

 

4 amulettes qui sont placées avec la momie. A partir de la gauche: « Le djed d'or », «La Boucle de cornaline», « L'oreiller » et le dernier objet est un appui-tête.

 

 

Un livre optimiste

 

La littérature funèbre, tel que décrite dans le Livre Des Morts, révèle la confiance avec laquelle est considérée la vie dans l'Au-Delà, quand le cœur de l'homme sera soupesé à son avantage sur la balance symbolique que représente la plume de Maat. Alors il connaîtra la félicité des Champs Elysées et l'emmènera dans sa céleste croisière ... Mais dans le cas contraire, on ne nous souffle mot de l'éventualité de son séjour en enfer ! Rien non plus quand aux règles qui président à l'évaluation du poids de l'âme, comparée à celui de la divine plume ... Ammit (le monstre mangeur des morts) lui-même, semble bien inoffensif; il se contente de s'asseoir près de la balance à côté du scribe-dieu Thoth et d'attendre sans hâte le résultat de l'opération !

De la 1ere à la dernière ligne du Livre Des Morts, seul apparaît Osiris triomphant en qui se confond une fois pour toutes le bienheureux disparu, assuré en outre des faveurs de la foule des autres pensionnaires de Panthéon.

 

La pesée du cœur, Anubis conduit Hunefer dans la salle de double Maat, où son cœur (sa conscience) est pesé par rapport à la plume de l'ordre, de la justice et de la vérité. Anubis vérifie l'aiguille de la balance, observé par le monstre « Dévoreur de Morts ».

 

 

Une mort fascinante

 

Il est tout à fait évident que les peuples de la vallée du Nil crurent sans réserve que la mort leur ouvrait les portes d'une nouvelle viens bien avant la fondation (vers 3100 avant J.-C.) de l'Empire des Pharaons. Ils n'étaient d'ailleurs pas les seuls à professer cette foi dans la haute Antiquité, mais ils étaient sans doute parvenus, en ce domaine, à un degré d'initiation plus élevé que leurs contemporain. Quoi qu'on en ait dit, l'extrême sécheresse du climat ne suffit pas à expliquer la préservation des corps et moin encore les rites et les techniques employés pour la prolonger. D'autres peuples vivaient dans les même conditions climatiques, sans pour autant se livrer aux mêmes pratiques.

En outre la momification et la richesse des ornements funéraires, les obsèques des rois et des notables égyptiens durent engloutir d'énorme fortunes si l'on en juge par le fabuleux tombeau de Tout-Ankh-Amon tel qu'il fut mis à jour par Howard Carter en 1922. Pourtant il ne s'agissait que d'un souverain fort jeune, d'un rang relativement modeste dans la dynastie pharaonique, dont au surplus la sépulture avait déjà été pillée dans l'Antiquité !

  

Tout-Ankh-Amon

 

 

Des rois aux gens du peuple

 

La tradition littéraire liées aux rites mortuaires, évolua à mesure que le régime se faisait plus « libéral ». Désormais accessible aux moins fortunés, le concours des scribes devait profiter à la popularité du culte d'Osiris au dépens de celui de , le dieu-soleil, qui réservait ses bienfaits dans l'Au-Delà aux seuls rois, considérés comme des demi-dieux, investis des mêmes pouvoirs magiques que les divinités dont il se réclamaient. Avec l'écoulement (entre 2250 et 2050 avant J.-C.) d'un pouvoir jusque la très centralisé, apparurent des manuscrits dont la clientèle se recruta parmis les nobles et les notables qui n'avait pas les moyens de s'offrire une pyramide. Enfin vint le Livre Des Morts, plus populaire parce qu'il était meilleur marché.

La pyramide était le symbole-clé de et les pharaons qui firent bâtir Kheops, Khephren et Mykérinos se comportèrent comme les zélés fidèles du dieu-soleil. De tous ces monuments solaires, celui d'Unas fut le 1er à avoir été tapissé d'un catalogue d'instructions comprenant incantation, hymnes, prières, etc. ... Visant à assurer au défunt souverain une seconde vie heureuse, analogue quand à son contenu à ce que serait mille ans plus tard, le Livre Des Morts.

 

 

Thèbes cité sacrée

 

Thèbes, était l'une des villes les plus célèbres de l'Antiquité. Son apogée date du second millénaire antérieur à la naissance de Jésus, au moment où les monarques et gouverneurs unifièrent le pays.

Amun, le dieu des Thébains est le meilleur exemple d'un phénomène fréquent, qui étendait à l'Egypte tout entière le rayonnement d'un culte exclusivement local, dès lors que la ville qui vénérait affirmait son hégémonie sur l'Etat. Il fut en effet bientôt regardé comme le successeur du dieu-soleil, au point de prendre le nom d'Amun-Rê.  

 

Thèbes, vue intérieure de la salle hypostyle de Karnak.

 

 

Les papyrus d'Ani, d'Hunefer et d'Anhai

 

Ani était un scribe royale, attaché au service des maîtres de la cité, commis à la comptabilité des revenus divins et directeur des greniers des seigneurs d'Abydos. Son épouse, Thuthu, portait le titre de Dame de la Maison et Gemat d'Amu-Rê, c'est-à-dire qu'elle comptait parmis les prêtresses affectées à la célébration des offices religieux. Hunefer, lui occupait un poste de surveillant au palais du roi Seti Ier. Anhai enfin était cantatrice au « collège »dédié au dieu Amun-Rê.

Avec ses quelques 24 m de long, le papyrus d'Ani est le plus grand ouvrage de l'ère thébaine que nous connaissons. Celui d'Hunefer mesure guère plus de 5,50 m et les litanies destinées à Anhai, 1 m de moin.

Nombreux furent les papyrus qui furent perdus du fait de l'emplacement qu'on leur avait affecté auprès des momies. Ceux qui se trouvaient dans les tombeaux d'Anhai et d'Hunefer furent préservés parce qu'on les avait glissés dans la cavité ménagée à l'intérieur d'une statuette.

Nul ne sais encore exactement comment le papyrus d'Ani fut déposé dans une tombe. Lorsque ce long document fut déroulé, il se trouvait dans un excellent état de conservation. Des administrateurs du British Museum achetèrent les 3 pièces à des marchands égyptiens, le papyrus d'Hunefer en 1852, les 2 autres en 1888.

 

Ani et sa femme en adoration, alors que le défunt va être admis dans les Champs de la Paix, séjour des âmes vertueuses.

 

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